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« La framboise : quel délice ! »

R. M. Koutlidis 2020

Sous ce titre était publié un article de l’Yonne républicaine dans les années 1960. Mais on a beau chercher aujourd’hui, bien malin celui qui trouvera encore des champs de framboisiers dans nos plaines…

Pourtant Montillot s’est doté depuis une vingtaine d’années d’un emblème associant framboises, cerises et cassis qui figure sur le site internet de la mairie, les correspondances, les enveloppes personnalisées du village.

Mais d’où vient l’attachement à ces cultures que l’on cherche en vain alentours?

La culture des petits fruits et en particulier des framboises a eu à Montillot sa période de gloire, au point qu’on peut affirmer qu’elle fait partie de notre patrimoine. C’était à Montillot une institution qui a perduré du XIXe siècle jusqu’au développement de la mécanisation des terres cultivées, qui a conduit, remembrements aidant, à la suppression progressive des haies, des arbres, des vergers et champs de framboisiers disséminés alentours.

Que de mois d’Aout passés à cueillir, ensemble, tous les deux jours, des kilos et des kilos de framboises, réparties précautionneusement en barquettes autrefois de bois, puis de carton, puis de plastique, parfois décorées d’une feuille, pesées, comptées, évaluées, pour être transportées sur les marchés, ramassées par des transporteurs, déposées chez de gros « clients » …

La framboise… Une vieille légende raconte que Zeus, enfant, fit retentir les échos de la montagne de cris furieux à rendre sourds les génies démoniaques eux-mêmes, et Ida, la fille du roi de Crête, pour le calmer, lui cueillit une framboise ; jadis, toutes les framboises étaient blanches. La nymphe, s’égratignant le sein, teignit à jamais les fruits d’un rouge éclatant, dont Zeus dès lors se régala, les grapillant à la volée en gambadant sur les pentes du mont qui porte le nom de la nymphe. Le botaniste Carl Von Linné accrédita cette histoire en baptisant au XVIIIe siècle cette exquise baie du nom de Rubus Idaeus en souvenir de Pline l’Ancien (1r siècle ap JC) qui dans son « Histoire Naturelle » la mentionne comme très abondante sur le mont Ida en Grèce.

La ronce [1] elle-même semble provenir d’Asie, plus précisément du Caucase, d’où seraient parties ses différentes ramifications. Le genre Rubus s’est établi sur tous les continents (sauf l’antarctique), sous toutes les latitudes, depuis le cercle arctique jusqu’aux tropiques, et, se dispersant, s’est diversifié (couleurs, saveur) ; il existe environ 200 espèces de framboisiers et plus d’une centaine de ronces, sans compter les nombreuses variétés créées et sélectionnées par l’homme. Ces baies ont été les premiers aliments de nos ancêtres chasseurs-cueilleurs, bien avant les graines et les herbes. On a retrouvé des restes de mûres dans les plus anciennes habitations humaines d’Europe. C’est une plante sauvage que les tribus du mésolithique ont su apprivoiser et cultiver.

Les framboises sont donc probablement issues des zones montagneuses d’Europe puis initialement cultivées au mont Ida en Turquie et produites dès la renaissance dans les jardins familiaux. Les amérindiens fabriquaient une pâte consistant en framboises écrasées dans du miel qui, séchée, se dégustait pendant l’hiver. La même recette, quasiment, était utilisée au moyen-âge et à la renaissance, période pendant laquelle on raffolait de confitures et pâtes de fruits.

Et c’est au Moyen-âge qu’on la baptisa Brambusia.

En tant que plante cultivée, le framboisier est cité pour la première fois par l’herboriste anglais Turner en 1548. Olivier de Serres (1539-1612), illustre agronome, conseillait la pâte de framboise, « recherchée pour son odeur agréable ». Les lettres de noblesse du framboisier ne sont vraiment acquises qu’en 1629 lorsque Parkinson dans son ouvrage « Paradisi in Sole Paradisus Terristris » consacre un chapitre entier à « The Rapis Berrie » dont il décrit deux types, rouge ou blanc. En France, La Nouvelle Maison Rustique dans son édition de 1732 décrit déjà toutes les grandes lignes d’une culture qui a relativement peu évolué depuis. Jusqu’au milieu du XIXe siècle, la framboise est plutôt destinée à la fabrication de boissons ou de parfums.

La culture de la framboise ne se développa en Europe et en Amérique du nord qu’au XIXe siècle. Dès lors, elle fut considérée comme un fruit de table et consommée en grande quantité. La culture de la framboise reste cantonnée dans les pays du nord de l’Europe (Russie, Angleterre, Hollande), et en France on la cultive surtout en Alsace et en Lorraine, en Bourgogne, célèbre pour ses fruits rouges (et dans la région parisienne).

A Montillot la culture de la framboise se développe en effet depuis la fin du XIXe siècle. On a vu précédemment avec Pierre GUTTIN qu’un certain nombre de jeunes en âge de travailler avaient suivi l’exemple de leurs aînés et migré dans la région parisienne pour des travaux agricoles saisonniers. Ces « migrants » avaient alors appris de nouvelles façons de travailler, notamment sur les fruits, et les méthodes de vente. Ils ont ainsi commencé à greffer les arbres fruitiers (Félix Savelli (1872-1947) était selon Jean Demay passé maître dans cet art qu’il aimait partager) et à planter framboisiers, fraisiers, cassissiers et groseillers, qui se sont comportés à merveille dans la plaine de Montillot.

La plaine (lieux-dits La Plaine de la Chally, La Canne, Les Sablons) est la zone cultivée la plus proche du village, la plus plate ; datant géologiquement de la fin de l’ère tertiaire, elle résulte de l’accumulation d’alluvions argileuses et siliceuses très anciennes mélangées à des détritus rocheux. Elle s’est avérée propre à la polyculture pratiquée jusqu’au remembrement de 1967 : blé, orge, betterave, fourrages, fruitiers de toutes sortes. [2]

Le terroir a donné à nos framboises leur parfum recherché.

Après – guerre la vie rurale reprend pied lentement. Certains sont revenus « au pays » après la perte de leurs commerces, de leurs biens, ou pour accompagner des parents vieillissants. D’autres reprennent possession d’exploitations maraîchères exploitées par les femmes pendant les années de guerre.

Et non, contrairement aux souvenirs de Pierre GUTTIN[3], l’histoire ne s’est pas arrêtée là. La vie au village se réorganise et l’habitude est prise (re-prise) de vendre en commun au nom d’un syndicat qui écoulait au meilleur prix les produits vers des entreprises de transformation en gros. Quelques documents comptables qui ont échappé au naufrage des décès, successions et ventes nous sont parvenus. Les deux plus anciens datent de 1955.

Le premier est adressé au « syndicat des fruits de Montillot » le 20 juin 1955.

Il s’agit d’un contact avec la maison L’héritier-Guyot afin d’établir une collaboration pour la fourniture de cassis et éventuellement de framboises.

Cette maison fondée en 1845 est renommée pour sa liqueur de cassis et existe toujours.

Aucun document ne permet de documenter cette collaboration. On note cependant que la culture du cassis s’est ensuite intensifiée.

Le second document est daté du 7 juillet émanant du mandataire « DE LESTABLE », aux Halles centrales de Paris.

Il avait accompagné un bordereau de vente d’un premier envoi. Sans doute de bigarreaux ou de framboises puisqu’il est question au verso d’un deuxième envoi très attendu de cassis, en grandes quantité.

S’il existait déjà avant-guerre, ce syndicat des fruits était donc toujours très actif 30 ans plus tard.

Qui étaient les membres de ce syndicat et comment fonctionnait-il ?

Quelques notes éparses, hâtivement relevées sur un gros bloc de correspondance, certaines paraphées par l’entreprise DELFINO (fruits et primeurs, 23 rue du Docteur- Haulin 75017 Paris 17e) se succèdent tous les deux ou trois jours en juillet 1956 ; l’année suivante, 11 livraisons entre le 30 juin et le 28 aout.

Il s’agit de framboises.

Elles étaient comptabilisées en « billots » et bien que ce terme ne soit plus vraiment utilisé comme unité de volume, il est très probable qu’il s’agissait de « cageots », si l’on en croit le dictionnaire en ligne « savoir.fr. », (car la définition n’est pas simple à retrouver !!) Les vendeurs ne sont notés que par leur initiale.

Cette fois, l’entreprise Delphino est domiciliée 94 rue St Honoré à Paris 1r.

Entre temps divers courriers nous apprennent que Mr Delfino père est décédé, et que son fils a repris l’entreprise. Il n’y a plus de « billots », ni de « cageots », mais des « baquets » pour le « vrac » et des « cartons ».

Sur ce dernier document sont répertoriés des maraîchers qui, membres du syndicat, exploitaient et vendaient ensemble une grande partie de leur production. On y retrouve, ce 9 juillet-là, Pierre Guttin, Roger Mathé, Pierre Danguy, Georges Laurin, Marcelin Sautereau, Marcelin Mailleau, Gabriel Savelly, Roger Millereau, Rémi Trier, Roger Trier et Charles Savelly.

La plus grosse quantité de framboises est produite par Charles Savelly.

Ils étaient parfois plus nombreux, comme en témoigne cette livraison datée de 1960 :

On y trouve G. Morizot, G. Seurre, P. Ventenay, H. Mouchoux, Petit, G. Laurin, M. Laurin, et M. Laurin, Leplat, Beauchot, Daiguemorte, Eter, Guilloux, Champy, Defert, soit plus de 20 maraîchers, du village ou ses hameaux, s’associant selon leurs cueillettes, avec 10 à 20 récoltants par jour.

Des documents plus récents, datés de l’été 1962 répertorie les ventes en fonction de la production et des producteurs.

On apprend ainsi que tous n’avaient pas les mêmes cultures.

Seul Gabriel Savelly œuvrait sur les trois fronts. Parmi eux, deux vendaient framboises et cassis ; trois framboises et bigarreaux ; quatre bigarreaux et cassis ; treize seulement du cassis, un seulement des framboises et un seulement des bigarreaux. La production de framboises à cette date avait été assurée par Maillaux, Guttin, Seurre, Savelly G., Morizot, et Trier R. Ces trois derniers assuraient aussi la production de cassis, avec Danguy, Ventenay, Mouchoux, Moreau, Laurin Georges, Laurin Mary et Laurin Marcel, Leplat, Beauchet, Sautereau, Daiguemorte, Savelly G., Landa, Trier R., Eter, Guilloux, Champy. Enfin, la production de bigarreaux était assurée par Maillaux, Guttin, Savelly G., Danguy, Ventenay, Mouchoux et Petit.

Cette exploitation en commun permettant la vente en gros, a perduré jusqu’au milieu des années 60, environ, et n’a sans doute pas résisté longtemps au premier remembrement (1967).

L’âge avançant, l’exploitation qui n’était pas reprise par de plus jeunes et la mécanisation des cultures ont sonné le glas de ce travail en commun. Bien sûr certains ont continué, bon an mal an, avec la vente sur les marchés d’Avallon et Auxerre ou même à quelques clients privilégiés. Un article de l’Yonne républicaine, datant du début des années 70 rappelle l’attachement du village à cette culture.

L’exode rural, vers des villes plus aptes à proposer des emplois à des jeunes fuyant un mode de vie qu’ils ne recherchaient pas, à des diplômés ne trouvant pas leur place loin des villes, l’industrialisation des campagnes, les remembrements successifs (en 1967, en 2002) sont venus à bout de ces parcelles de cultures maraîchères et fruitières morcelant nos plaines et qui ne sont plus que des souvenirs.

Alors… peut-être préfère-t-on avoir le souvenir de …cela:

plutôt que d’avoir vu apparaître et se multiplier … cela:

« récolteuse de framboise »

« Nos » framboises, cultivées en plein champ, en terre légère et fraiche, furent produites en quantité suffisante pour être non seulement vendues au détail sur tous les marchés environnants, mais aussi collectées et livrées en commun par un syndicat créé dans les années 20 à des entreprises de transformation en gros. Les distillateurs de Dijon la recherchaient, un restaurant gastronomique proche proposait une « feuillantine aux framboises de Montillot » …

Le souvenir que l’on en garde est assez précieux pour en avoir fait le symbole du village, et pour que le désir de reprendre cette culture soit exprimée, envisagée même, si l’on en croit le rapport de la CCAVM datant de mars 2020, où figure dans les projets la « remise en place de la culture des petits fruits rouges ».

 Quoi qu’il en soit, souhaitons que les rêves d’un renouveau de ces cultures puissent voir le jour. Si tant est que cette culture méticuleuse séduise encore quelques adeptes.

Perspectives!!

rapport de la CCAM, 2020

[1] Le framboisier appartient à la famille des ronces (rubus). Le terme « Ronce » vient du latin classique « Rumex » qui signifie « Dard ». Selon les botanistes, le terme désigne soit l’ensemble des Rubus, soit uniquement ceux dont les fruits tombent avec leur réceptacle. C’est d’ailleurs là l’une des principales différences entre la framboise et la ronce, la première seule perdant son réceptacle à la cueillette.

[2] Elle contraste avec la pente qui s’amorce sur le flanc des collines menant vers Rochignard et Les Hérodats, composé de calcaires et de marnes, exposés au Sud-Est, et propice à la culture de la vigne.  De nombreuses parcelles de quelques ares chacune, couvraient la pente jusqu’à la lisière des forêts, entre la vallée boulanger et la route des Hérodats, puis, par Les Osiers, les terres à vignes rejoignaient Vaudonjon et ses côtats (Montillot comptait 60Ha de vignes à la fin du 19e siècle, et les vignerons de profession étaient concentrés au Vaudonjon).

[3] « les ventes ont cessé faute de main d’œuvre pour la cueillette après la guerre de 39-45. » 

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Le testament de Girart de Roussillon

Les archives des châtelains de Montillot sont constituées principalement d’actes notariés – achats, ventes et échanges de propriété immobilières -. Ces documents se terminent souvent par quelques lignes d’une écriture différente de celle du notaire : « je soubsigné, confesse avoir repceu les droicts de lots et ventes du contract cy dessus » ; signé « le recepveur de Messieurs les Vénérables du Chapitre de Vézelay ».

Qui étaient ces moines qui prélevaient des impôts sur nos ancêtres ?

Et pourquoi de Vézelay ?

Nous avons consulté les travaux de plusieurs historiens de la région…

« Au nom de la Sainte et indivisible Trinité, Père, Fils et Saint- Esprit. Commencement de la charte ou testament du comte Girart, fondateur des monastères de Pothières et Vézelay, en vertu des privilèges de l’autorité apostolique désignés ci-dessous, lesquels valident et corroborent à perpétuité ce même testament… » 

C’est la première phrase de la traduction d’un texte latin, dont une copie effectuée en 1170 sur parchemin avec enluminure, d’après l’original rédigé vers 858, est déposée à la Bibliothèque municipale d’Auxerre. (un fragment de photographie de la 1ère page est reproduit ci-contre).

C’est donc Girart de Roussillon qui aurait fondé le monastère de Vézelay, par ce testament.

Rappel Historique

Où  situer ce Girart dans notre Histoire de France ? Feuilletons rapidement nos livres d’école, en cherchant les grands repères de cette époque…  

En 771, Charlemagne avait succédé à Pépin le Bref. Combattant les envahisseurs  Avars, Slaves, Saxons et Bretons, il devint le maître d’un territoire immense rappelant l’ Empire romain d’ Occident, disparu 3 siècles auparavant.

Roi chrétien, il imposa sa religion aux peuples Germains et assura la protection des possessions du pape Léon III, qui le couronna Empereur à Rome en l’ An 800.

Mort en 814, son fils Louis le Pieux (appelé aussi « le Débonnaire ») lui succède, et pour conserver l’unité du territoire, ce dernier élève son fils aîné Lothaire à la dignité d’ Empereur, ce qui mécontente gravement les 2 autres fils qu’il eut de sa première femme Ermengarde. Et sa seconde femme Judith de Bavière lui donne en 823 un autre fils Charles (le futur Charles le Chauve), à qui elle veut naturellement faire attribuer une part de la succession impériale !

Des clans se créent entre les prétendants et les nobles qui les soutiennent. L’insurrection éclate dans le pays et le règne de Louis le Pieux se termine dans la confusion. La guerre se poursuit entre les frères, aboutissant à la défaite de Lothaire en juin 841 à Fontenoy- en- Puisaye  (à 25 km d’ Auxerre ; un obélisque nous rappelle cette bataille). En 843, le traité de Verdun partage l’ Empire de Charlemagne en 3 parties :

  • à Charles II le Chauve la Francie occidentale
  • à Louis II le Germanique la Francie orientale ou Germanie
  • à Lothaire 1er un territoire intercalé entre ses 2 frères, la Lotharingie (la future Lorraine, sujet de dispute entre France et Allemagne…). 

Les invasions normandes ajoutent à la confusion : en 843, une flotte remonte la Loire ; les Vikings s’emparent de Nantes et massacrent l’Évêque. D’autres flottes atteignent Toulouse la même année …et Paris le dimanche de Pâques 845…Chartres est prise en 858…Le Midi de la France n’est pas épargné.

858: C’est justement l’année du testament de Girart et de sa femme Berthe.

Son nom s’écrivait Gher- hard et signifiait « tout- à- fait brave ».  Il devint célèbre dans les romans de chevalerie ; un  poète anonyme 12 siècle,  s’inspirant de la tradition orale, a traduit sa vie et ses exploits dans  «  la Geste de Girart de Roussillon » en langue d’oc et d’oïl.

Il a donc fallu trier la part de la légende et celle de l’ Histoire …

Girart faisait partie de la haute noblesse de l’époque, descendant de ces « Maires du Palais » , ces chefs de la Maison Royale qui, – tels Pépin de Herstal, puis son bâtard Charles Martel -,  ont profité de la décadence des Mérovingiens pour prendre petit à petit le pouvoir dans la 1ère partie du 8ème siècle et créer la dynastie des Carolingiens.

Il avait hérité d’un titre familial : « Comte de Paris et de Soissons ».

Avant 818, il avait épousé Berthe, fille du Comte Hugo de Tours et sœur de l’épouse Ermengarde de Lothaire  1er, qui avait alors le titre d’ « Empereur d’ Occident ».

Son beau-père le charge de l’administration de l’ Avallonnais et du Lassois ; il en profite pour y  acquérir plusieurs domaines.

En particulier,  entre 820 et 840, par faveur spéciale de Louis le Pieux, sur recommandation de son épouse Judith, – dont il était proche parent par Berthe -, il obtient le domaine royal « Villam Vezeliacum ». On a retrouvé dans des documents anciens la trace de ce domaine à l’époque gallo-romaine (« Vercellacus »), puis de son affectation à l’ Abbaye St Germain d’ Auxerre (cartulaire daté de 572), sous le nom de « Videliacus ».

Il faut bien voir qu’il ne s’agit pas de notre colline de Vézelay, mais d’un territoire compris entre l’actuel village de St Père et le site dit « des Fontaines Salées », qui fut utilisé par l’homme depuis bien longtemps : on y a retrouvé les vestiges d’un lieu de culte celte, de puits en troncs de chênes pour la collecte de l’eau salée, de thermes romains, de villa gallo-romaine et d’un chemin rejoignant le centre sidérurgique proche… Ce fut d’abord «  Vézelay sur Chors » (pour « Cure ») puis St Pierre le Bas avant d’arriver à St Pierre, devenu St Père…

Ces propriétés avallonnaises sont menacées dans la période de querelles d’héritages qui suit la mort de Louis le Pieux. Girart  prend parti pour son beau-frère Lothaire 1er , qui lui confie l’administration des comtés de Lyon et de Vienne, puis la gérance du royaume de Provence. Il a fort à faire là-bas pour se défendre des prétentions de Charles le Chauve, rival victorieux de Lothaire, et pour repousser les Normands, parvenus en 860 jusqu’à Valence !

Il réussit  dans le même temps à conserver et à accroître ses acquisitions dans le Comté d’Avallon.

Mais un problème de succession se pose : le fils unique de Girart et Berthe était mort très jeune et leur fille se destine à l’ Eglise.

Et il faut empêcher Charles le Chauve d’annexer ces domaines, qui se trouvent dans son royaume… !

Girart et son épouse trouvent la solution : animés de sentiments très religieux, ils fondent 2 monastères dans leurs propriétés, l’un à Pothières, en « Pays Lassois » ( proche de Châtillon-sur-Seine), l’autre à Vézelay, au bord de la Cure ; soumis à la règle de Saint Benoît, le premier accueillera des hommes et le second des femmes. A ces 2 monastères ils firent don de leurs autres biens de l’ Avallonnais, du Tonnerrois et du Sénonais (« …avec cette réserve que nous en gardons l’usufruit tant que durera notre vie dans la chair… »)

 On trouve au folio 23 du manuscrit :

« Ensuite nous avons donné le domaine de Dornecy, celui de Cisternas, de Fontenay (près Vézelay), et de Molnitum, et tout ce que nous avons acquis dans le pagus d’ Avallon déjà nommé, ou celui de Tonnerre, avec toutes les dépendances … »

Certains historiens de la région ont traduit « Molnitus » par Montillot… ; ce n’est pas évident …D’ailleurs Ernest PETIT, dans son « Etude historique » de l’ Avallonnais, nous fournit (page 129), d’après un document du 8ème siècle, une liste des noms latins des villages du « pagus » d’ Avallon : Molnitum y désigne Montlay (en Auxois), dans le canton de Saulieu…Notre village sera cité plus clairement dans des textes ultérieurs.

Le Testament

Puis ils eurent l’idée de mettre ces fondations sous la protection directe du pape, les rendant ainsi inviolables. Folio 24 :

«…nous avons soumis ce monastère et l’autre susdit, avec tous leurs biens, aux très saints apôtres réunis à Rome et par acte de testamentaire confirmé pour toujours, nous les avons confiés aux saints évêques de la Ville qui occuperont ce siège année après année, afin qu’ils les administrent (sans qu’ils soient pour autant autorisés à les donner en bénéfice ou les échanger avec qui que ce soit), qu’ils en disposent à perpétuité et que, par leur zèle appliqué ainsi que par leur gestion vigilante, selon notre dévotion, une religion de piété et de vertu s’y développe toujours, pour la gloire de Dieu… »

De plus, tous les biens de ces monastères demeureront  « par la garantie de ce même testament perpétuel, sans aucune charge extérieure ni taxe d’assujettissement… », « …à ceci près que chaque année, comme présent au très  vénérable siège des bienheureux apôtres auxquels nous avons soumis ces sanctuaires , ils verseront deux livres d’argent au bienheureux évêque de la Ville de Rome… » (folio 23).

Enfin, autre disposition importante : « nous insistons fermement … », écrit Girart, «   pour que, lorsque l’abbé ou l’abbesse …aura quitté la lumière de ce monde, …ces communautés…aient ce pouvoir…de procéder…à l’élection d’un autre abbé ou d’une autre abbesse de bonne vie et de bon témoignage, d’un commun accord…et avec, sur ce sujet, l’approbation ultérieure de l’évêque qui, à ce moment-là, aura mérité le siège apostolique… » .

Encore fallait-il faire accepter cette Charte-testament par les autorités intéressées …

Girart dû faire preuve de diplomatie, puisque d’une part, le pape Nicolas 1er accepte la donation et confirme par une bulle, en mai 863, que les monastères jouiront de la protection du Saint- Siège, et d’autre part,  – ce qui est plus surprenant – , Charles le Chauve, par un diplôme royal , confirme ces fondations en 868 et s’engage, pour lui et ses successeurs, à défendre les « immunités » de ces monastères…

Conservant l’usufruit sa vie durant, Girart devait assurer la protection de ses récentes fondations ; mais sa charge le retenait entre Lyon et la Provence …Les moniales de Vézelay , en butte à l’hostilité ambiante et aux attaques de bandes, se replient vers d’autres maisons de leur ordre au bout d’une quinzaine d’années. Girart les remplace par des Bénédictins venant d’Autun, sous la direction de l’abbé Eudes

Les invasions des Normands continuent…En 885, ils assiègent Paris ; mais le roi Charles le Gros pour éviter le combat, autorise le chef des Vikings à aller ravager la Bourgogne ! Une flottille arrive donc dans la vallée de la Cure au début de 887, détruit le monastère de Vézelay (sur Cure) et poursuit vers le Morvan.

Mais avant l’arrivée des Normands, les moines et les habitants de la vallée de la Cure sont montés se réfugier sur la colline proche. Girart étant mort en 877, c’est l’abbé Eudes qui prend la décision d’y implanter définitivement  le monastère.

Qu’est devenu le monastère après la mort de Girard de Roussillon?

Le monastère s’implante définitivement sur la colline. On ne sait s’il y avait là, déjà, des constructions à ce moment ; on suppose qu’il existait une sorte d’enceinte de murailles pouvant servir de refuge.

Tite-Live aurait fait allusion à cet endroit dans son « Histoire de Rome », en l’appelant « mons scorpionis », ou mont du Scorpion ; on voit là une allusion à la forme particulière de la colline, plus évidente en vue aérienne, qu’en la gravissant à pied !

Ce qui semble sûr, c’est que le Vézelay actuel est vraiment rentré dans l’ Histoire en cette année 887 …

Une partie des habitants de la vallée est montée sur la colline avec les moines ; un sanctuaire est rapidement édifié et dès 888, Eudes  obtient du roi le transfert des privilèges accordés à l’ancien monastère. Le pape Etienne VI renouvelle lui aussi le privilège pontifical en 897 et précise que le « castellum » doit servir de refuge aux moines, à leur serviteurs et à la population avoisinante…

Un bourg se crée et se développe autour de l’abbaye. Il prend le nom de Vézelay, le village resté au bord de la Cure devenant le « Vieux- Vézelay ».Le temps passe, marqué par des gestions plus ou moins rigoureuses selon les abbés ; mais dès leur élection ceux-ci prenaient bien soin de faire confirmer par le Saint- Siège les privilèges accordés à leur abbaye…

Divers événements se répercutent sur la vie du bourg : l’angoisse due à l’approche de l’ An 1000, l’affaiblissement de la dynastie carolingienne suivi de l’élection du premier des Capétiens en 987, la guerre du roi de France Robert II le Pieux pour « récupérer » le Duché de Bourgogne, avec siège d’ Auxerre en 1003, puis d’ Avallon, et massacre d’une partie des  habitants de cette ville, en 1005 …

Autun; Le paradis terrestre

D’autres touchent très directement Vézelay : destruction du monastère par un incendie (entre 910 et 940), prise de pouvoir temporaire par un groupe de moines de l’abbaye de Cluny en 1027 profitant d’une période de désordre … On voyait déjà s’amorcer les luttes d’influence qui ont secoué cette abbaye pendant plusieurs siècles : le comte de Nevers considérait que son autorité seigneuriale devait s’appliquer à cette parcelle de son comté, et l’évêque d’Autun, bien que sachant parfaitement que Vézelay relevait directement du Saint- Siège, admettait difficilement de ne pas participer à la gestion d’une   Abbaye située dans les limites de son diocèse…  

C’est que ce monastère faisait des envieux : riche au départ grâce aux dons de Girart, elle continuait à recevoir de pieuses donations…  

Et vint un abbé qui eut une heureuse  inspiration …C’est  Geoffroy, élu en 1037. Depuis plusieurs années, attirés par des rumeurs de « prodiges », des pèlerins accouraient de plus en plus à Vézelay.  Entre 1020 et 1040, pour lutter contre les multiples guerres locales, l’ Eglise de France proclame une « Trêve de Dieu ». C’est alors que profitant de ce mouvement vers une « paix chrétienne », Geoffroy promeut le culte de Sainte Marie-Madeleine, la pécheresse amie de Jésus. Des foules venant de l’ Europe entière accourent, demandant l’aide de la sainte à toutes les victimes des guerres et des injustices…La présence de reliques fait l’objet de contestations et de plusieurs explications différentes …mais cela  ne décourage pas les pèlerins.  

un pèlerin

Les marchands affluent à Vézelay ; les ressources de l’ Abbaye s’accroissent, ainsi que son patrimoine immobilier. Pour accueillir les foules, l’église abbatiale ne suffit plus ; l’abbé Artaud, élu en 1096, lance la construction de la grande basilique romane, construction qui, rencontrant de nombreuses difficultés, s’est étalée sur un siècle et demi. ( Il faut noter que les pierres blanches utilisées dans cette construction auraient été tirées de la carrière de Montillot, tandis que les pierres brunes – calcaire mélangé d’oxyde de fer -,  viendraient de Tharoiseau).

Le patrimoine de l’Abbaye

Le patrimoine de l’abbaye ?

Le testament de Girart citait quelques villages des environs : Dornecy, Fontenay, Montlay, Vézelay (le Bas…)…

Des copies des bulles papales du 12ème siècles qui confirmaient les privilèges de l’ Abbaye sont déposées aux Archives d’ Auxerre ; certaines ont été transcrites dans le bulletin de la Société des Sciences de l’ Yonne de l’année 1868 ; elles sont rédigées dans un latin médiéval ecclésiastique qui pose des problèmes aux traducteurs…Ces textes présentent l’inventaire des possessions du moment :  on y voit donc , non seulement l’étonnante expansion de ces biens au fil des années, mais aussi l’ordre dans lequel les villages proches – dont le nôtre – sont venus se ranger sous la juridiction directe de Vézelay.

Les bulles de 1102, 1169, 1182 et 1245.

1)- Bulle du pape Pascal II   (21 Novembre 1102)

On trouve dans l’inventaire des églises, donc des paroisses, du diocèse d’Autun : St Père, Vergigny, St Pierre et St Symphorien de Dornecy, St Sulpice d’Asnières, St Germain de Fontenay-sous-Vézelay, St Pierre de Blanay, St Georges de l’Isle- sous- Serain, St Syagrius de Flay, St Léger de Fourcheret (futur St Léger- Vauban) et St Andeux en Morvan.  

2)- Bulle d’Alexandre III  (16 Février 1169)

Diocèse d’Autun : 8 acquisitions nouvelles  => Précy ; Givry ; Voutenay ; Montillot (« Montirueth ») ; Brecy( ?) avec son domaine, ses  granges et ses revenus ; Chamoux.

Diocèse d’Auxerre : Trucy, avec son église et tous ses biens ; Sacy ; Mailly- la- Ville et Mailly- le– Château ; Arcy, Bessy avec son église et tous ses biens.

Il faut ajouter à cela : 9 églises dans le diocèse de Nevers, une sur Mâcon ; 6 sur Clermont ; 4 sur Bourges ; 4 sur Poitiers ; 2 sur le Mans ; 2 sur Saintes ; 19 sur Sens ; une trentaine sur Beauvais ; 7 sur Noyon ; 3 sur Parme et 2 sur Imola (Italie)… 

3)- Bulle de Lucius III  (19 Décembre 1182)

Ce texte ne reprend pas l’inventaire ; il précise certains points des statuts :   « l’évêque diocésain ne pourra ni faire des processions, ni dire publiquement la messe, ni faire acte de juridiction, ni prononcer l’interdit sans l’agrément de l’abbé ou de ses moines, dans le monastère, dans la ville, dans les églises d’Asquins et de Saint Père qui (… sunt in radice montus ipsius villae sitae …) sont au pied même de la  montagne… »

4)- Bulle d’Innocent IV  (janvier 1245)

Même remarque sur l’inventaire ; mais sur l’interdiction d’officier adressée à l’évêque d’Autun, sont citées en plus de St Père et Asquins les églises de Châtel-Censoir, l ’Isle (sur Serein) et Montillot (…in ecclesiis Castri, Insulae et  Monterione… ). Pour justifier l’orthographe, on peut imaginer simplement que le copiste soit d’origine italienne !

La « poté »

Ainsi  un groupe de  paroisses entourant Vézelay s’est trouvé soumis à l’autorité civile, administrative et judiciaire des abbés. On appelait « poté », – du latin  « potestas » = « pouvoir » – , le territoire ainsi contrôlé par un pouvoir seigneurial. Des bornes de pierre en marquaient en principe les limites.

Mr B. PUJO, en annexe de son ouvrage « Histoire de Vézelay » cite des « textes officiels » définissant la « poté » de Vézelay :

– dans le cartulaire présenté le 12 février 1463 au prévôt de Sens, qui dénombre les biens de l’abbaye, on lit que:

  • se trouvent dans la « poté » les villages de Vézelay, Saint-Père, Nanchèvres, Fontette et Morond, Tharot (Tharoiseau), Asnières, Montillot, Asquins.
  • sont situés hors de la « poté », les villages de Brosses et Fontenille, Chamoux et Cray, Fontenay …

– dans une lettre du  1er décembre 1531 de François 1er, demandant la sécularisation de l’abbaye , il est précisé que celle-ci dispose « d’un territoire de trois lieues ou environ de longueur et de largeur, non sujet immédiatement à autre qu’au dit Saint- Siège ».

Quelques pas dans la suite de l’histoire

La deuxième partie du 12ème siècle et le début du 13ème marquent l’apogée de Vézelay: non seulement des foules de pèlerins y accourent , mais des événements importants y ont lieu , avec la venue de hauts personnages…

Bernard de Clairvaux

Le jour de Pâques 1146, Bernard de Clairvaux, du haut de la colline, face à Asquins, appelle le peuple chrétien à la défense des lieux saints (2ère croisade).

A la Pentecôte 1166, l’Archevêque de Cantorbéry Thomas Becket célèbre une messe solennelle à la Madeleine.

En 1190, Philippe- Auguste et Richard Cœur de Lion se donnent rendez-vous à Vézelay pour un départ vers Jérusalem (3ème croisade).

Entre 1244 et 1270, le roi Louis IX (Saint-Louis) vient à 4 reprises…

Pourtant, à la même époque, la vie du monastère est agitée…

Les différends avec le Comte de Nevers sont incessants ; en 1152 , les habitants de Vézelay, mécontents de leur Abbé, appellent le Comte à leur aide et constituent une « commune » libre ! Le roi Louis VII résout le conflit en donnant raison à l’ Abbé…Les rois de France interviennent de plus en plus souvent : en 1280, Philippe III le Hardi place l’abbaye sous sa garde, sans que le Saint- Siège conteste cette décision. En 1312, l’indépendance judiciaire et administrative est perdue : Vézelay et sa « poté » sont rattachées au bailliage de Sens. L’enclave autonome devient une « possession de la couronne ».

L’abbé conserve la « justice haute, moyenne et basse » mais doit l’exercer dans le cadre des ordonnances royales. Il peut continuer à lever des impôts : cens, champart, droit de banalité (usage des pressoirs et des moulins), taille (qui s’ajoute à la taille royale), dîmes, droit de pêche…

Il est probable que Montillot ait été moins perturbé que les villages de la vallée par les évènements qui ont secoué Vézelay. Nos ancêtres ont certainement bien accueilli, comme les habitants des autres villages, les concessions accordées en 1136 par l’abbé Albéric par un texte qui fut une charte   d’affranchissement : la principale mesure, marquant la fin du régime de « servage » portait sur l’abolition de la « main-morte ». Les biens des hommes mourant sans héritiers directs ne reviendront plus au seigneur, mais pourront être légués aux plus proches parents légitimes ; en compensation, cette charte rappelait les divers impôts dus à l’ Abbaye…

La suite ?…

Aux Archives départementales de l’ Yonne, on peut consulter un dossier intitulé « Chapitre de Vezelai – Seigneurie de Monteliot (réf : H1997) et on y trouve les documents les plus divers.

Datant du 12 Février 1464 (recopié en 1753, donc lisible sans difficulté…) : le Chapitre 29 du Cartulaire de l’ Église de Vézelay, intitulé « Monteilliot », fixant « pour taille » à chaque famille un maximum de 15 sols…

Un document de 1575 compte 82 ménages « non compris ceux de Marault… »

Un acte de vente, daté du 29 Août 1660, d’une terre de François TRIJOU, vigneron, à Edme DETHIRE, boulanger, établi par le notaire GROSSOT, en présence de Me Jacques GOURLET, procureur au bailliage.

Du 5 Avril 1686, une sommation au Chapitre de Vézelay, de la part de « vénérable et discrète personne Me Guillaume COLLAS, prestre- curé de Monteluot (c.f . l’histoire du banc de l’église…), …demandant le paiement de 300 livres pour  « portion congrue »…

De 1749 à 1762 , le dossier du procès entre le Chapitre et les habitants de Montillot au sujet des « bourgeoisies » (l’une des impositions…)

…De multiples petites histoires qui font la vie d’un village au cours des siècles…

Bibliographie

  • Alfred TURGOT : « Histoire de la Ville et abbaye de Vézelay » – 1826
  • Ernest PETIT : « Avallon et l’Avallonnais, étude historique » – Auxerre 1867.
  • Bulletin de la Société des Sciences de l’Yonne – 1868.
  • M. SOMMET : « Ville de Vézelay , topographie, statistique, histoire » – Auxerre 1879.
  • Abbé A. PISSIER :  « Recherches historiques sur Asquins » – Bulletin de la Société d’Études d’Avallon – 1908.
  • Collection « Le patrimoine mondial » : « Le patrimoine de la Basilique de Vézelay » – Flohic Éditions 1999.
  • La chanson de geste de Girart de Roussillon
  • Bernard PUJO : « Histoire de Vézelay » – Perrin – 2000.

 

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histoire régionale

Montillot…et ses environs, de l’an 1500 à l’an 1800

André Buet †, mars 2017

« Après une longue période de guerres, de luttes intestines, de peste et de famine, la fin du 15ème siècle et le début du 16ème se présentent pour le royaume de France comme un retour à une ère de prospérité »(cf B.PUJO)

La riche Italie attire les convoitises ; sous le prétexte de reconquérir d’anciennes possessions, nos rois successifs Charles VIII, Louis XII et François 1er, franchissent les Alpes avec leurs chevaliers, atteignant Florence, Rome et Naples. Mais leurs victoires sont sans lendemain, en face de la puissance grandissante de Charles Quint et de son « Saint Empire Romain Germanique ». François 1er est fait prisonnier à Pavie en 1525 ; il est libéré par le traité De Madrid en janvier 1526.

En 1521, allant de Sancerre à Avallon, François 1er avait fait étape à Vézelay. L’abbé Dieudonné de Beduer sollicita auprès de lui la sécularisation de l’abbaye, l’affluence des fidèles étant de plus en plus incompatible avec la solitude permettant le respect des règles monastiques. Ce n’est qu’en 1537 que le pape Paul III accéda à cette demande présentée par le roi de France. La Madeleine devint une collégiale avec 12 chanoines et un abbé séculier.

Monteluot et ses fortifications (cf «Les fortifications de Montillot accordées par François 1er »).

Des places fortifiées existent depuis longtemps dans les vallées : autour de Vézelay et de sa position dominante, Pierre-Perthuis, Saint-Moré, Chatel-Censoir…

Mais même les villages « de l’intérieur » étaient perturbés :

–       Les guerres entre le roi de France et le duc de Bourgogne ont fait de l’Avallonnais, aire frontalière, une zone de combats.

–       Les multiples trêves libéraient des combattants qui, désoeuvrés et sans ressources, se répandaient dans les campagnes.

–       Des famines dues aux mauvaises récoltes jetaient sur les routes des milliers d’indigents, volant ou diffusant des maladies.

–       Pour éviter la contagion dans les périodes d’épidémie – surtout de la peste …- on exilait les malades à l’extérieur des bourgs…

La plupart des villages de la région ont donc obtenu du roi, entre 1520 et 1550, des « lettres patentes » les autorisant à se protéger par de hauts murs et des portes fortifiées : Tharoiseau, Asquins, Voutenay, Précy-le-Sec, Pontaubert…

Montillot, cadastre Napoléon

C’est en juin 1527 que les « habitans et manans » de Monteluot adressent leur supplique au roi François 1er. Celui-ci demande une enquête au bailli d’Auxerre et l’accord final est donné en octobre…Murailles, tours, fossés, canonnières, ponts-levis, barbacanes…sont autorisés.

Mais ces constructions devaient être faites sans subventions, au frais des villageois. En examinant les vestiges actuels, on ne peut donc s’étonner de la modestie de la solution retenue : un simple mur, – dont le tracé a imposé le dessin du village jusqu’au 19ème siècle -,avec des portes, aujourd’hui disparues, permettant le contrôle des entrées et sorties…

Les guerres de religion dans l’Avallonnais.

Au cours de la 2ème moitié du 16ème siècle, Vézelay « redevint une place forte, un lieu de violence et de haine ».

Le moine Luther, initiateur d’une « religion épurée », avait été excommunié en 1520. Ses idées avaient été reprises et développées par Calvin, qui s’était installé à Genève comme « pasteur de l’Eglise protestante ». En 1536. Il y fut rejoint par des disciples, dont Théodore de Bèze, originaire de Vézelay.

« Le protestantisme s’est implanté très tôt dans les vallées de l’Yonne et de la Cure, dans l’Auxerrois et le Morvan »(B.PUJO)…et les persécutions commencèrent (cf E.PETIT) :

En 1538, un médecin et sa femme « accusés d’hérésie et de secte luthérienne », sont brûlés à Auxerre, place de le Fénerie.

En 1542, un gibet est dressé à demeure à Vermenton.

Quelques années plus tard, le château de Girolles fut pris par une troupe d’environ  300 protestants qui rançonnèrent les habitants de la région.

Des églises réformées s’installent, en 1547 à Corbigny, en 1555 à Vézelay.

En 1560, la collégiale de Vézelay échoit à Odet de Coligny, cardinal de Châtillon ; en 1561, après avoir assisté au colloque de Poissy, – où Catherine de Médicis réunit en vain des responsables catholiques et protestants -, il se convertit à la religion protestante, est excommunié en 1563 et rallie l’armée huguenotte.

En mars 1569, une troupe de 12000 protestants s’emparent de Vézelay, puis, pillant et rançonnant les environs, prennent « Mailly-le-Château, Mailly-la-Ville et quelques forteresses de la Puisaye mais échouent devant Joux-la-Ville ».

A Asquins, ils massacrent le curé, ainsi que « des religieux franciscains et des catholiques réfugiés dans l’église ».

Après la paix de St Germain (8/8/1570), la garnison protestante de Vézelay rejoint La Charité, place forte accordée aux protestants par Charles IX.

Le 24 août 1572, St Barthélemy, à Paris, massacre de chefs protestants et de leurs partisans, plus de 3000 victimes.

La France se divise, entre des « ultra-catholiques » qui créent la « Sainte-Ligue » autour du Duc Henri de Guise, et le parti protestant, dirigé par Henri de Bourbon, roi de Navarre, – futur Henri IV .

Vézelay, avec comme abbé Louis de Guise, et en 1585 Joachim de Rochefort comme gouverneur, devient un bastion de la Ligue.

« En 1587, des Suisses et des Allemands, alliés des Protestants, traversent la Bourgogne et rançonnent Tonnerre, Mailly-la-Ville et Vermenton » (cf PUJO).

Le duc de Guise est assassiné en décembre 1588.

Une bataille près de Montillot  (cf PETIT et BAUDOUIN) : Au printemps 1589, un officier ligueur, François de Beaujeu, sieur de Jaulges, part d’Auxerre avec des troupes – infanterie, cuirassiers à cheval, arquebusiers et 2 pièces de canon -, et pour mission de conquérir les petites places de l’Auxerrois et de l’Avallonnais. Visant d’abord Mailly-la-Ville, il pille Migé et Chastenay. François de Rivière, seigneur de Champlemy, lieutenant général pour le roi en Nivernais, avait mis une cinquantaine de soldats pour défendre Mailly-la-Ville.

Joachim de Rochefort, gouverneur ligueur de  Vézelay, venu par le Sud vers Mailly, fut rejoint par les ligueurs d’Avallon, et « un engagement meurtrier eut lieu près de Montillot contre les troupes royalistes de Champlemy » (16 juillet 1589). La petite garnison de Mailly-la-Ville se rendit sans combat. Ensuite les Ligueurs incendièrent le village d’Annay-la-Côte et massacrèrent les habitants. L’approche de troupes royalistes les obligea à renoncer à attaquer Girolles et à se replier sur Auxerre.

 Le 1er août 1589 Henri III est assassiné par le moine Jacques Clément. Le 11 août, le duc de Nevers attaque le bourg fortifié d’Asquins, qui fut « livré au pillage et la garnison passée au fil de l’épée » (cf CHALLE). L’attaque de Vézelay est suspendue.

En 1590, Edme de Rochefort succède à son père et reste attaché à la Ligue jusqu’en 1593 et la conversion d’Henri IV ; les garnisons de Vézelay et Mailly-le Château se soumettent. Les habitants d’Avallon s’entêtèrent plus longtemps et ne cédèrent que le 31 mai 1594, par l’entremise d’Edme de Rochefort qui, après avoir franchi la Porte Auxerroise, fut « reçu par Sébastien FILZJEAN, le plus ancien avocat de la ville » (cf E.PETIT).

Mais le pays reste peu sûr ; plusieurs « capitaines » travaillent pour leur compte, pillant les villages…

Finalement, les royalistes reprennent en 1595 Epoisses, Montréal, Thizy, Girolles, Noyers, Arcy, Tharoiseau, Mailly-la-Ville, Châtel-Censoir…

Les guerres de la Ligue se terminent…mais en 1596 «  la peste sévissait avec une grande recrudescence à Avallon »… « les habitants se retirèrent dans les pays voisins » (cf E.PETIT), comme en 1588. ( d’autres épidémies ont été signalées en 1577, 1583 et 1586).

Après l’Edit de Nantes (13/4/1598), « la paix revient dans les campagnes » (cf PUJO) , et ensuite « les importants évènements qui se sont déroulés dans le royaume au cours du premier tiers du 17ème siècle n’ont guère eu d’écho sur la colline de Vézelay : l’assassinat d’Henri IV (1610),la régence de Marie de Médicis, la prise de pouvoir du jeune Louis XIII »…(cf B.PUJO). 

Les documents administratifs

Le 16ème siècle est marqué par le perfectionnement des organes de gouvernement, qui « donnent aux rois les moyens d’exercer leur autorité absolue » (cf Hist. Louis Girard).

Des lois organisent l’armée, les finances, la justice.

En 1539, par l’Ordonnance de Villers-Cotterets, François 1er prend 2 mesures importantes : il crée un « état-civil » en prescrivant aux curés d’enregistrer les baptêmes et les enterrements. Et il favorise l’unité linguistique du royaume en ordonnant l’emploi du français à la place du latin dans les actes judiciaires.

Tout cela s’ajoutant à l’expansion de l’imprimerie depuis le siècle précédent, bouleverse les conditions de transmission du savoir et élargit les publics.

Les actes administratifs  en particulier  se traduisent par des documents écrits, paraphés par des responsables, et archivés.

Plusieurs siècles plus tard, il nous est donc possible de  retrouver dans les rayons de nos « Archives départementales » – et, plus récemment, sur Internet – des actes de naissances, de mariages et d’inhumation, des contrats d’achat et de vente de propriétés….qui permettent de reconstituer la vie des familles de nos villages.

Enfin des nouvelles de Montilliot…ou Monteluot

En examinant systématiquement les Archives de l’Yonne, on a pu trouver et déchiffrer des documents de cette époque, relatant des évènements concernant des habitants de notre village.

L’impôt dû au curé par les paroissiens

On a – sous la cote ADY G2547 – une copie faite en 1722 d’un rapport de l’huissier de Vézelay Gabriel MILIER, « sergent royal à cheval », venu le 22 décembre 1571 faire connaître à chacun des chefs de famille de Montilliot la sentence du 7 août précédent prononcée par la Cour du Parlement de Paris, leur ordonnant de payer à la « vénérable et discrète personne Me Philipe Broté prêtre Bachelier en droit curé de l’Eglise paroissiale de la Ville et fauxbourg de Montilliot », « pour 3 années d’arrérages échues » :

  • Pour ceux d’entre eux « laboureurs et menans charrues », au nombre de 31 nommés: «  par chacun an au jour et fête de Saint-Rémi », « une quarte de blé seigle » et «  5 deniers tournois ».
  • Pour ceux « non labourans n’y menans charrues », au nombre de 54 nommés, « une quarte d’avoine » et 5 deniers. 

Incident aux Magnes-Vattaire

En 1595, le jour de la Pentecôte, Gilles Gay, Edme Laboureau et Gabriel de Lannes, armés de pied en cap, creusent des fossés pour détourner l’eau de la mare située aux Magnes-Vattaire,- propriété des chanoines de Vézelay -, et pour en détourner les poissons. Ils sont poursuivis par le bailli de Monteliot, puis par celui d’Auxerre…

17ème siècle  

Familles nobles du Vézélien.

Les Longueville et les La Borde

De nombreux documents conservés dans les archives privées du « château » de Montillot (maintenant déposés à Auxerre – fonds YAHER) ont pu être exploités, nous permettant de mieux connaître les familles nobles de notre région et leurs propriétés.

Par exemple, par un acte de 1614, le notaire T. PERNOT, de « Montelluot », établit un contrat d’amodiation (location avec bail), du moulin de Fontenille par son propriétaire Philippe de BURDELOT, « escuyer, seigneur de Fontenilles-les Forests (aujourd’hui le domaine de la COUR), paroisse de Brosses », au meunier Nicolas JOSMIER.

A partir de 1639, on trouve, rédigés et signés de Jean PERNOT, puis de Estienne GROSSOT, la plupart des documents de constitution du patrimoine terrien de cette petite noblesse locale.

On commence par Jacques de LONGUEVILLE, seigneur de Sarrigny (près de Poilly sur Tholon) qui, en 1639, habitait « en partie » à Montelluot

Il avait épousé Barbe de LA BORDE.  La Borde est aujourd’hui encore une grande bâtisse isolée, dans une petite plaine de cultures, au milieu des bois, à 2,5 km à l’ouest d’Asquins et à 4 km au sud de Montillot. Les LA BORDE ont pris le titre de « seigneurs de Montelluot » (sans qu’il s’agisse d’un « fief », les abbés de Vézelay restant les vrais « seigneurs »).

Un partage fait par Me Léger PINARD, notaire à « Asquien », le 29 Mars 1640, a attribué à Barbe de LABORDE un huitième des propriétés dites alors de « La Borde Roncin » ou « la Vieille Borde », comprenant bâtiments, vergers, jardins, colombier, terres, prés, bois, buissons et bestiaux, ceux-ci tenus par le métayer Estienne FORESTIER.

En juin 1639, Jacques de LONGUEVILLE avait acheté quelques terres, puis un ensemble plus important de propriétés, bâtiments et terres attenantes au lieudit « Toucheboeuf », – qui porte encore ce nom aujourd’hui – et qui était alors considéré comme un faubourg de « Montelluot », puisque situé au-delà du « Chemin de Ronde ». Il s’agit de l’emplacement du manoir actuel, manoir encore appelé « château » par les gens du village.

A l’époque, il y avait là un « bastiment… consistant en trois chambres, grenier dessus, un verger attenant, une cour, aysances et appartenances ». Prix d’achat : 155 Livres Tournois, payées comptant à Jacques JOYAULT, laboureur à Malfontaine, Anne JOYAULT et leurs époux, les précédents propriétaires.

En 1648 : Bon de LA BORDE, frère de Barbe de LA BORDE, habitant jusque-là à La Vieille Borde, achète les terres et bâtiments acquis par de LONGUEVILLE à Montillot de 1639 à 1641, pour 1000 livres Tournois. Il prend aussi le titre de « Sieur du Fez » (ou Fey, ou Faÿ) qui figure dans les actes à partir de mai 1648 (Le bois du Fey – dit aujourd’hui le Fège – est limitrophe des terres de Toucheboeuf).

Le dit « Sieur de LABORDE » habite Montelluot à partir de 1649 et ce jusqu’à sa mort, fin 1661 ou début 1662 ; il achète un certain nombre d’autres terres, la plupart dans le même secteur de Toucheboeuf, tandis que Jacques de LONGUEVILLE demeure à La Brosse Conche (aujourd’hui « la Brosse Conge »), près de Sermizelles.

Le 24 Juin 1659, un contrat d’achat d’une terre de Toucheboeuf à la veuve BERTOU est signé du notaire Jean PERNOT. A partir du 16 Novembre 1659, les actes sont signés « Estienne GROSSOT, nottaire tabellion Royal gardenottes contrôleur Héréditaire » à Montluot. Bon de LA BORDE continuera d’acheter des terres dans la plaine de Monteliot.

Les Savelli

Le 9 mars 1562, a été baptisée à Toucy, Edmée, fille d’Horace SAVELLI.

Celui-ci venait d’Italie, dont il s’était échappé après un duel, laissant pour mort son adversaire; il s’est remarié en 1590 avec Charlotte de Montbeton, de Champeaux, près de Toucy. Il a fait l’objet d’une « lettre de naturalité » du roi Henri IV en 1593. Horace était issu d’une très ancienne famille d’Italie qui, au 11ème siècle, avait donné à l‘Eglise les papes HONORIUS III et IV. Les registres paroissiaux de Toucy, Thury, Lainsecq et Etais-la Sauvin permettent de reconstituer la généalogie des Savelli de Puisaye jusqu’à nos jours. On y trouve plusieurs « seigneurs de Champeaux, Grangette, Maupertuis, la Guirtelle… ».

Certains d’entre eux se sont alliés avec des familles nobles de l’Avallonnais, tels que les BURDELOT, « seigneurs de Fontenille » et les LA BORDE, « seigneurs de Montillot et du Faye ». (NB: c’est le chanoine LEVISTE, de Sens, qui a publié en 1993 dans les Cahiers généalogiques de l’Yonne, un premier article intitulé « Des palais romains aux manoirs de Puisaye ; l’étrange destinée des Princes Savelli » .

Les autres notables

Edme BROTHEY, le curé guérisseur

C’est aux Archives Départementales d’Auxerre que l’on trouve un document manuscrit de 37 pages intitulé « Années 1602-1603. Procès-verbal des témoignages rendus en faveur d’Edme BROTHEY, curé de Monteluot, poursuivi à la requête des chirurgiens et barbiers d’Auxerre, pour raison des cures qu’il a faites ».

Il s’agit du deuxième curé identifié dans notre paroisse à la fin du 16ème siècle.

En plus de son ministère, il utilise largement ses dons de « rebouteux » au profit de très nombreux patients : il les guérit au moyen de manipulations et d’onguents ; il se déplace quand on l’appelle à l’aide ; mais il accueille aussi les malades en son presbytère, les nourrit et les soigne sans rien exiger des plus pauvres…

Dans ce procès-verbal, 15 témoignages sont transcrits par 2 notaires d’Auxerre pour assurer sa défense ; on trouve ainsi un drapier et un vigneron qui ont glissé sur la glace et se sont fracturés l’épaule, une servante tombée dans un escalier, une femme revenant des champs tombant de sa charrette dont le cheval s’est emballé, un charpentier tombé d’un échafaudage…

L’authenticité des personnages cités a été confirmée par l’exploitation des fiches de la Société Généalogique de l’Yonne (« Genea89 N°96).

Le curé COLLAS

Après les curés BROTHEY (ou Broté… ?), il y eut Jean POURCIER, inhumé dans l’église en 1634 ; Denis DELAPLACE, qui a participé en 1648 au baptême d’une cloche ; Edme ( ?) DELAPLACE, cité dans un acte notarié en 1653 ; X…PIOT, cité vers 1654 comme « curé de Montillot, recteur du Collège de Vézelay ; Lazare GOURLET, décédé fin 1671 et inhumé dans l’église ; et, de janvier 1672 à sa mort en novembre 1715, Guillaume COLLAS.

Nous disposons de quelques détails sur le ministère COLLAS aux Archives de l’Yonne, dans le dossier « Abbaie de Vezelai-Cure de Monteliot »(cote H1976) ; les textes originaux en latin , traduits au 20ème siècle, ont été transcrits en 2003 (doc ARCH0314 sous le titre « histoire de l’abbé Collas).

On sait ainsi que sa nomination a été proposée en janvier 1672 à l’abbé de Vézelay par les membres du chapitre de « l’insigne église de la bienheureuse Marie Magdeleine de Vézelay ».

On peut lire aux Archives de Saône-et-Loire un rapport rédigé par le curé Collas vers 1680 à la demande de l’évêque d’Autun sur « l’Estat de la parroisse de l’Eglise de Monteliot » ; « Saint Laurend martir » y est fêté le 6 mai… ; il y a 3 autels, « le grand autel, l’autel de la Ste Vierge et l’autre de Ste Brigide »…Tous les accessoires liturgiques y sont énumérés et décrits : ciboires, calices, chandeliers, chasubles, croix, lampes, images, nappes… « Le chœur de l’église est voûté. La neffe ne l’est pas. Il y a deux cloches…Le cimetière est attenant à l’église, fermé et une croix de bois au milieu »… « Il y a deux cent quarante cinq communians »…

Un autre rapport, daté d’août 1692, précise les ressources du curé desservant : « le revenu est de la portion congrue par composition faicte a l’aimable avec Messieurs du Chapitre de Vezelay qui possèdent les dixmes de bled et revenus de la dite paroisse d’où ils tirent près de six cent livres ». Une précision : « il y a une chapelle ruinée que l’on appelle vulgairement le prioré et qui a onze bichets et demy de bled, moityé froment et avoine, de rente…possédée par Messieurs du Chapitre de Vézelay ».

A citer aussi , deux rapports d’inspection de 1689 et 1692, rédigés par le curé de Saisy, archiprêtre de Vézelay, en présence d’habitants du village, dont « messire Dieudonné de Laborde, escuyer fabricien » ; constat : les instruments liturgiques sont bien entretenus …

Le curé COLLAS et la noblesse locale: l’affaire des bancs de l’église (à partir de 1698).

Chaque dimanche, Dieudonné de la Borde et sa famille – dont son épouse Elizabeth de Burdelot et leurs 4 enfants, avec sa sœur célibataire Germaine de la Borde -, assistent à la messe dans l’église St Laurent.

Depuis plusieurs dizaines d’années, une habitude est prise : en tant que seule famille noble du village, et bien qu’ils ne soient pas les vrais « seigneurs » de ce lieu, ils disposent d’un banc dans le chœur même de l’église. Mais la famille de la Borde, avec ses 4 enfants, devient « encombrante » et le curé COLLAS leur « remontre  que le chœur de son église était fort petit » et leur demande de reculer leur banc hors du chœur. Attachés à leurs privilèges, les de la Borde refusent et les incidents commencent : après des avertisssements en chaire, le curé, aidé par des paroissiens, retire le banc du chœur…Le curé se plaint par écrit à l’évêque d’Autun et de la Borde au Chapitre de Vézelay.

Les moines du Chapitre donnent raison aux de la Borde, tandis que l’évêché paraît sensible à la proximité de « personnes du sexe » vis-à-vis du pupitre du prêtre, parle « d’incommodité et de notable indécence », et propose un partage en deux groupes…

L’application de cette mesure fut très discutée, et on ne sait pas ce qu’il en advint avant le décès du curé COLLAS en 1715…

Pour plus de détails, voir sur le site l’article intitulé « L’affaire des bancs de Monteliot » rédigé en 1996 à partir de documents archivés au « Château ».

Le curé COLLAS rédacteur des registres paroissiaux

En 1539, François 1er avait ordonné l’enregistrement des baptêmes ; en 1579, Henri III exigea la tenue de registres de sépultures et de mariages. En 1667, Louis XIV définit plus précisément la rédaction des registres et prévoit la remise d’un double à l’administration civile ( le baillage). Ce dernier règlement fut mieux respecté, ce qui nous permet aujourd’hui de consulter dans tous nos villages des listes de baptêmes, mariages et décès datant de cette époque…Pour commencer,  le curé COLLAS nous rapporte le 9 avril 1672,  le baptême de 2 jumeaux, Edme et Jacques COUTURIER d’une famille de Tameron.Dans la période qui suit, – 1672 à 1699 soit 28 ans -, il a rédigé pour la paroisse de Montillot 948 actes, dont 467 baptêmes, 100 mariages et 381 sépultures.N.B. : Ces actes, comme ceux des périodes suivantes – jusqu’en 1823 – ont été transcrits dans des cahiers – 8 au total -, dont un exemplaire est déposé à la mairie de Montillot.

Le curé COLLAS et les chanoines de Vézelay

Le roi Louis XIV avait décidé en 1685 que les gros « décimateurs » – ceux qui prélevaient la dîme – devaient donner aux curés des paroisses de leur ressort une somme suffisante pour les faire vivre ; c’est ce qu’on appela la « portion congrue », qui était de 300 livres. Aussitôt que fut publié cet édit royal, le curé de Monteliot fit, par ministère d’huissier, sommer les chanoines de Vézelay de lui payer la portion congrue, s’offrant à abandonner en échange les biens qui dépendaient de sa cure. Le 6 juin 1686, les chanoines déclarent laisser au dit curé les revenus de sa cure et lui abandonnent en outre 30 bichets de grain pour parfaire le total de sa portion congrue.

Les notaires 

Toussaint FERRAND (1633-1704), époux de Marie DE TROTAS, après avoir été huissier royal.

Jean PERNOT a succédé à son père Jean PERNOT en 1634

Estienne GROSSOT : Sur de nombreux actes d’état civil co-existent les signatures du curé Collas de Maître Grossot, notaire et homme de loi, résident à Monteliot, parfois noté marguillier.

18ème siècle

Début de siècle à Vézelay

Dans cette période  « la colline de Vézelay vit entièrement à l’écart de l’histoire du royaume » (B.Pujo). L’abbaye a été attribuée en 1702, sur recommandation de Vauban à l’abbé de Tencin ( ensuite archevêque, puis cardinal, décédé en 1758) . En 1740, après la guerre de succession d’Autriche, arrivèrent à Vézelay et St Père des prisonniers hollandais. Durant l’été 1718, ne disposant pas assez d’eau à Vézelay pour éteindre un incendie, on a dû « défoncer des barriques de vin pour maîtriser le sinistre » ; la municipalité décida ensuite de construire 4 citernes pour recevoir les eaux pluviales…

1700: un nouveau maître est nommé à Monteliot (240 habitants).

…ce sont les archives de l’évêché d’Autun qui nous l’apprennent :  … « Les habitants ont nommé pour marguillier, chantre et maistre d’école dans la paroisse le sieur Guillaume DEFER » ; il sera rémunéré chaque mois par les familles en fonction de leur situation. Il n’est pas précisé si filles et garçons étaient ou non dans les mêmes classes ; l’Eglise ne le permettait pas à l’époque.

Voir détails dans l’article l’école publique à Montillot au 19ème siècle.

Le grand Hiver de 1709

Les historiens ont évalué l’effet des famines autour de 1,3 million de décès pour 1693-1694, et 600000 pour celle de 1709, soit 3% de la population de la France de l’époque. Nous n’avons pas de relation de l’hiver de 1709 à Montillot ; à la différence de certains autres curés, l’abbé COLLAS ne commentant pas l’actualité dans ses registres paroissiaux…

A proximité, nous disposons des « recherches historiques sur Asquins », de l’abbé PISSIER, curé de St Père de 1894 à 1934. Il  rappelle la lourde charge pesant sur le peuple à la fin du règne de Louis XIV et ajoute « le terrible hiver de 1709 mit le comble aux souffrances de tous ».

A partir d’octobre 1708, vent violent, puis pluies continues, alternant avec neige et gelées. « Le 6  janvier 1709, le froid redouble »… « blés et vignes sont gelés »… « pendant 35 jours, le froid est des plus intenses »…. « après ce terrible hiver la famine fut extrême »… « les pauvres ne vivaient que d’herbages et de racines…aussi vit-on partout une grande mortalité »….le 18 avril «  les paroisses de Vézelay, Asquins, St Père, Fontenay et Chamoux s’assemblèrent et allèrent en procession à St Lazare d’Avallon ».

Même constat dans la plupart des villages…Ainsi à Migennes, près d’Auxerre, un chercheur a relevé 11 décès en 1707, 27 en 1708 et 45 en 1709, dont 23 enfants au-dessous de 15 ans.

Plus impressionnants les chiffres fournis par l’historien Max QUANTIN pour Vermenton : « il mourut en cette année 1709, du 1er janvier au 31 décembre, 319 personnes »

A Montillot, il y avait eu une pointe importante en 1704 : 43 décès dont 22 enfants, la cause en est inconnue… seulement 17 en 1708 et 1709, dont 11 enfants (9 de moins de 2 ans…).

état civil de Montillot, 1700-1709

1752- Contestations des habitants de Montillot

Lorsque les habitants du village, à la suite de la sécularisation de l’abbaye de Vézelay en 1537, furent devenus les vassaux des chanoines, ils se crurent affranchis de certains impôts, – droit de bourgeoisie, droits de corvée, taille…-, et refusèrent de les payer à leurs nouveaux maîtres. D’où des contestations périodiques, sanctionnées par des condamnations,  jusqu’à la Révolution.

L’une des dernières, en 1752, concernait le paiement de la taille : le 30 mars, à la requête du Doyen du Chapitre, Jacques DAILLY, premier huissier audiencier à l’Election de Vézelay, apporte à chacun des 55 chefs de famille de Montelliot, l’assignation à payer ce qu’il doit…Le document présentant la liste des destinataires nous permet de connaître les métiers de chacun d’eux (ils sont reportés dans le doc ARCH0303 intitulé  « Noms de familles relevés à Montillot aux 16ème, 17ème et 18ème siècles ») ; on remarque qu’on trouve au bourg surtout des manœuvres, des laboureurs et des blatiers – ou blatayers, des marchands de grains -…et au « Vaudongeon », – alors dans la paroisse d’Asquins -, surtout des vignerons… ; on imagine les « côtats » plantés de vignes à cette époque…

1767- Incident dans les bois de Brosses

Le 18 juin, le troupeau des frères BERTHOUX, laboureurs demeurant à Bouteau, a été surpris par des gardes, en train de paître des jeunes pousses de chêne.

La propriétaire Edmée Françoise de la Borde, domiciliée au « château » de Montillot, fait convoquer les contrevenants devant la « Justice et seigneurie de Malfontaine, Fontenille les Forests, Bouteau et dépendants ». A l’époque de Louis XIV, il y avait en effet à Malfontaine, ainsi qu’au Gué de Combre voisin, de l’autre côté du ru de Brosses, plusieurs maisons, et même un notaire…

Les pièces de ce dossier ont été conservées dans les archives du « château ».

Les BERTHOUX expliquent d’abord qu’ils étaient seulement de passage, évitant un chemin impraticable ; mais au cours d’une visite commune des lieux, ils sont confondus par les gardes. Le 28 août , en audience à Malfontaine, ils sont condamnés à une amende de 15 livres. Ils refusent de payer et font appel auprès du baillage d’Auxerre. Cet appel est jugé non valable à Auxerre et reporté vers le Procureur général du Roy aux Eaux et Forests de France à Paris …Nous ne connaissons pas la suite…( voir plus de détails sur l’article intitulé : « huit bœufs et une vache dans un bois taillis »). Aux Archives de l’Yonne, on trouve le texte d’une sentence délivrée en 1648 par ce même organisme royal pour un délit aussi insignifiant commis dans les bois de Vaulanne….

1768- Anecdote : les habitants du Vaudongeon veulent une chapelle .

L’église d’Asquins, leur paroisse, se trouvant à plus de 3 km, les représentants des 42 ménages du Vaudongeon, avec l’accord de leur curé B.GROGNOT, adressent à l’Evêque d’Autun une « supplique » exposant les difficultés  qu’ils rencontrent, surtout en hiver, pour se rendre à la prière, et demandant la construction d’une chapelle toute proche. En juillet 1768, l’archiprêtre de Vézelay est allé sur place et a reconnu le bien fondé de cette demande.

La chapelle a donc été construite vers 1770.

En fait, cette chapelle, si ardemment souhaitée par les habitants de ce hameau, n’aura été un lieu de culte qu’une vingtaine d’années. Car la Révolution est arrivée, les biens ecclésistiques ont été nationalisés ; l’adjudication définitive de ce bâtiment à Denis COLAS, cultivateur, a eu lieu en 1799.

Le document ARCH0313 présente les détails de cette affaire sous ce même titre, ainsi que la liste des propriétaires successifs jusqu’à nos jours.

1789 – Début de la Révolution. Le cahier de doléances de Montillot.

Les cahiers de doléances ont été écrits, à la suite de l’ordonnance royale du 24 janvier 1789, par la Noblesse, le Clergé et le Tiers-État, pour servir à l’assemblée des États généraux convoqués par Louis XVI, le 1er mai 1789.

Les « habitants de la paroisse et communauté de Montillot » ont donc rédigé un « cahier des plaintes et doléances » pour « proposer tout ce qu’ils croient utile pour le bien général du royaume ».

Le texte intégral en a été reproduit dans le « Bulletin de la Sosiété des Sciences historiques et naturelles de l’Yonne » de 1885.

Retenons-en les points principaux…

  • Il faut supprimer les trop nombreux intermédiaires chargés de la collecte des impôts.
  • Il faut supprimer certains impôts : les « aides » qui gênent le commerce et les « gabelles »qui font le sel « trop cher pour les gens de la campagne ».
  • …Créer un impôt territorial fonction du seul revenu des propriétés.
  • …Simplifier et unifier les procédures de justice, dont la durée «  ruine quelquefois les parties ».
  •  …Que l’impôt appelé « droit de corvée » récemment créé, soit utilisé pour l’entretien des chemins publics.

Le 15 mars 1789, ont signé 17 habitants : P., L. et Charles Carillon ; E. Pernot ; Jean Brisdoux ; C. Guilliou ; Marcelot ; M. Porcheron ; D. et P. Guilloux ;  Pernot ; G. Luly ; A. Mercier ; P. Degoix ; Defert ; Defert (ancien praticien).

1789-1790 – La Révolution à Montillot : nationalisation des biens ecclésiastiques.

Il s’agit d’une décision prise par l’Assemblée Constituante le 2 novembre 1789 dans le but de renflouer les caisses de l’Etat : « Tous les biens ecclésiastiques sont à la disposition de la Nation »… Ils prennent le nom de « biens nationaux ». Il en résulte des opérations étalées sur une dizaine d’années au moins : inventaires, estimations et adjudications, avec une comptabilité rigoureuse…

Les biens « nationalisés » appartenaient sous l’Ancien Régime, soit au Chapitre de Vézelay, soit à la cure de Montillot, soit à la fabrique, – organisme de gestion (entretien de la nef et autres biens rattachés à l’église) composé d’un groupe d’habitants élus-.

Les acheteurs sont, soit des bourgeois de la région, soit, souvent regroupés, les paysans et laboureurs du village, nos ancêtres…

Les dossiers de ces opérations sont classés aux ADY-série Q.

On en relève ici les points caractéristiques :

  • Le 1er septembre 1790 : inventaire des biens de la cure et de la fabrique, dont l’église du village et la chapelle du Vaudongeon.
  • En juin 1791, estimation des biens de la cure de Montillot.
  • En décembre 1791, adjudication définitive des biens de la cure de Montillot, partagés entre des notaires de la région et des habitants du village.
  • En juin 1791, adjudication définitive des biens du Chapitre.
  • En janvier 1794, inventaire du mobilier de l’église par un délégué du district d’Avallon.
  • En janvier 1795, adjudication définitive des biens de la Fabrique à des habitants du village.
  • En juillet 1796, adjudication définitive du presbytère (proche de l’église) au citoyen François MAUPIN.
  • En juin 1799, estimation de la chapelle de Vaudonjon.
  • En juillet 1799, adjudication définitive de la « chapelle du Vaudongeon » à Denis COLAS et 3 autres cultivateurs.

1789-1790 : Réorganisation de l’Administration civile.

En novembre et décembre 1789, l’Assemblée Constituante a supprimé les provinces et créé 83 départements divisés en districts et eux-mêmes en cantons.

Le 14 décembre 1789, sont créées les communes.

Vézelay devient chef-lieu de canton, avec les communes de Asquins, Givry, Blannay, Foissy, Pierre-Perthuis, Fontenay, Domecy-sur Cure, Tharoiseau.

Montillot, agrandi du Vaudonjon et des Hérodats, est rattaché au canton de Châtel-Censoir – devenu « Sensoir sur Yonne », qui sera supprimé sous l’Empire (1801).

Le premier maire élu pour 2 ans en janvier ou février 1790, selon la procédure  définie par l’Assemblée Constituante – élection par les citoyens « actifs » imposés au dessus du seuil de 10 journées -, fut Louis Nicolas Marie MULLOT de VILLENAUT, propriétaire du « château » depuis son mariage en 1771 avec Elizabeth de la BORDE, fille de Bon de la BORDE et de Marie Louise SAVELLI .

 Pierre CARILLON lui succède début 1792, et le maire précédent est désigné comme « officier public » chargé de dresser les actes d’état-civil. Ensuite, selon leur disponibilité, on trouve d’autres rédacteurs des actes : Jean PORCHERON, Antoine Jacques DEFERT, Jean BRISDOUX …

1790 : nouvelle organisation du Clergé.

L’Assemblée Constituante, emportée par son élan réformiste a voulu calquer l’organisation de l’Eglise de France sur celle du royaume ; de plus, elle a voulu « libérer » le Clergé de l’autorité du pape, considéré comme « puissance étrangère ».

Le 13 février 1790, les Constituants s’attaquent au clergé régulier : la loi ne reconnaît plus les vœux monastiques perpétuels et supprime les congrégations où les vœux solennels étaient prononcés. Les moines sont incités à démissionner.

Le 12 juillet 1790, une loi définit la « Constitution civile du Clergé » et réorganise le clergé séculier.

Il est créé 10 « arrondissements métropolitains » avec des « évêques métropolitains » et 83 évêques (un par département). A tous les niveaux, les titulaires deviennent des fonctionnaires de l’Etat, élus comme les députés,  et doivent prêter serment « à la nation, à la loi et au roi », sous peine de poursuites. Ces mesures entraînent des troubles importants dans certaines régions. Mais dans le district d’Avallon, 7 prêtres seulement sur 70 refusent de prêter serment…

L’abbaye de Vézelay est particulièrement pénalisée par les lois révolutionnaires .

Le Chapitre, organe de gestion des villages de la « poté », – dont Montillot -, est dissous. Ses propriétés deviennent « biens nationaux » ; l’inventaire en est fait en mars 1790. Les chanoines ne prêtent pas serment, mais ils ne sont arrêtés qu’en 1793 . Dix chanoines sont condamnés à la déportation. Les 2 paroisses de Vézelay, St Pierre et St Etienne, sont dissoutes et leurs églises fermées.

A Montillot, le curé de la paroisse Jacques Anne DESAUTELS, avait succédé à l’Abbé GOUREAU en janvier 1764 . Les actes de baptême, mariage et sépulture sont écrits par lui sur les registres paroissiaux jusqu’en octobre 1792 , l’Assemblée Législative ayant confié aux Municipalités le 20 septembre 1792 la tenue de « registres d’état-civil ». Comme la majorité des prêtres de l’Avallonnais, il a prêté serment à la Constitution.

En juillet 1795, on retrouve l’écriture du curé DESAUTELS, se présentant comme « secrétairegreffier, au deffaut de membre du Conseil Général qui sache écrire ». Il meurt le 18 Août 1796 à Montillot à 78 ans.

Les comptes de gestion de la commune de Montillot en 1789 et 1790.

Ce document a été rédigé puis archivé par son auteur sous le titre « Compte que rend aux citoyens formant le Conseil général de la Commune de Montillot le Citoyen Nicolas Villenaut, maire de la dite commune pendant les années 1789 et 1790 ».

L’exploitation détaillée de ce texte a été effectuée dans le document ARCH9828., sous le titre « comptes de gestion de la commune de Montillot en 1789 et 1790 ».

Il s’agit d’une comptabilité sérieuse des recettes et dépenses :

–       Les recettes proviennent de la vente de coupes de bois communaux.

–       Les dépenses sont liées aux besoins courants de la communauté : entretien des chemins, transport de matériaux, achat de mobilier, paiement des gages des employés, règlement des impôts dus par la commune…

Une autre partie de ces archives réunit les lettres adressées au maire par les autorités de tutelle : il s’agit à cette époque des Services administratifs de la Généralité de Paris, représentés par « le Sieur MACART d’ARC, Sous-Chef du Bureau des Domaines du Roi ».  Les premières lettres de cet organisme sont adressées au ‘Sindic de la Communauté de Montillot et Vaudonjon », et, à partir de 1790, au « Maire de Montillot».

Ce fonctionnaire contrôle dans les moindres détails les comptes de la commune.


Anecdote : 5 avril 1793 – César Lavirotte, futur inspecteur des finances, arrive à pied à Montillot.  

Un historien amateur de Côte d’Or, M. Bernard LEBLANC, – qui s’est intéressé aux personnalités originaires du canton d’Arnay-le Duc -, a attiré en  2003 l’attention de la mairie de Montillot sur la publication récente par les éditions « la Vouivre » d’un ouvrage où notre village était cité.Il s’agit d’un manuscrit ancien rédigé par un dénommé César LAVIROTTE ( 1773-1859), né à Arnay-le-Duc dans une famille de la petite noblesse provinciale, qui, après une formation en école d’artillerie, passa d’abord 17 ans aux Armées, sous le Directoire, le Consulat et l’Empire. Recruté ensuite vers 1810 dans le corps des Inspecteurs du Trésor, il prendra sa retraite d’Inspecteur des Finances 1ére Classe en 1830, puis sa retraite définitive en 1846. Il est élu maire de Champignolles en 1852.Ce sont 2 inspecteurs des Finances qui ont retrouvé son manuscrit à la fin du 20ème siècle.Etant royaliste, il eut quelques problèmes pendant la Révolution, et dut échapper plusieurs fois à des poursuites…C’est ainsi qu’en 1793, il chercha refuge auprès d’un ami de son père, Mr de Villenaut, à Montillot. Il raconte dans ses Mémoires : « Enfin, après trois heures de marche dans ces pays inconnus de moi, j’atteignis le village de Montillot situé au milieu d’une plaine fertile… ».Son récit nous présente des « instantanés » très vivants de l’intérieur d’une maison de Montillot il y a plus de 2 siècles ; les personnages nous sont connus : à côté du maître de maison, son épouse Edmée de la Borde, sa mère Marie Jeanne de Savelly, sa fille Françoise Mullot de Villenaut… L’article du site Internet retrace l’évolution des bâtiments du « Château depuis le 17ème siècle).En octobre 2009, a été commémoré à Champignolles le 150ème anniversaire de la mort de César Lavirotte.