Notion de Paléographie

A. Buet †, 2002

On constate en effet qu’il y a une vraie traduction à effectuer : les mots sont assez proches du français actuel, mais beaucoup de lettres sont très différentes (un tableau, présenté après la fin de ce chapitre, indiquera les correspondances entre les signes anciens et actuels). Il n’y a pas de ponctuation ni d’apostrophes, pas d’accent sur les « e » et rarement de point sur les « i ». Les majuscules sont peu employées. Certains mots sont coupés au milieu, alors que 2 mots qui se suivent peuvent être soudés.

Enfin, pour écrire plus rapidement, on supprime des lettres ou des syllabes… Mais on le signale !

Lorsque on supprime les lettres de la fin du mot, on peut, soit tracer un trait au-dessus des premières syllabes, soit déformer la dernière lettre , sans relever la plume, par un trait « plongeant » ou « relevé », au-dessous ou au-dessus de la ligne …

On peut aussi supprimer les lettres du milieu du mot , et le signaler par les mêmes types de traits que dans le cas précédent ! C’est au lecteur de deviner !

Il y aussi des signes particuliers – les « notes tironiennes », du nom de Tiron, esclave de Cicéron -, utilisés dans l’Antiquité, qui remplacent des groupes de lettres rencontrés fréquemment , tels que «  con » , « et », « -ur », « -us », « par », « per », « -pro », « pre », « que »…

Et chaque « scribe » a ses manies !

Et voilà la « traduction » ligne par ligne du texte ci-dessus (les lettres sont toutes reproduites, les abréviations complétées, accents et ponctuation ajoutés pour faciliter la compréhension).

Le vendredy troisiesme jour du moys de Janvier

mil six cens troys avant midy devant nous …

Daulmoy et Loup Horry notaires tabellions royaulx

gardenottes hereditaires au bailliage Siège présidial

et prevosté d’Aucerre soulzsignez s’est adressé

vénérable et discrette personne messire Edme

Brothé prestre curé de Monteluot, lequel

nous a dict qu’il est travaillé et poursuivi à la

requeste des lieutenant et maistres chirurgiens

et barbiers de ceste ville d’Aucerre pour raison

de quelques cures qu’il a faictes tant en ceste ville

que autres lieux, de plusieurs dislocations,

fractures dos et menbres, jalissements ( ?) de nerfs

et autres infirmitez dont plusieurs personnes

estoient atteinctes et détenuz malades, et

parce que ce qu’il en a faict a esté à grandes

instances, prières et suplications sans aucun

lucre ny proffit, mais par charité et

amour crestienne envers les pauvres malades…

Plusieurs observations :

  • les « i » sont souvent remplacés par « y » : « vendredy », « moys », « troys », « midy »,…
  • les « s » finaux » sont souvent remplacés par « z » : « soulzsignez », « infirmitez », « detenuz »,
  • on n’écrit pas « dit » , « fait », « atteint », mais « dict » , « faict », « atteinct »…
  • on écrit « ung » pour « un »…
  • L’accent circonflexe n’est pas encore utilisé, il remplacera plus tard le groupe « st » : exemples => « prevoste », « prestre », « maistre », « esté »,…
  • On écrit à l’imparfait « estoit » ou « estoyt » pour « était » ; « pouroyt » pour « pourait »…
  • La forme négative actuelle « ne..pas » se réduit à « ne ».